Rencontre avec Thibaut Gamba, chef exécutif du Logis de la Cadène

lundi 23 décembre 2024 14:12
Rencontre avec Thibaut Gamba, chef exécutif du Logis de la Cadène

C’est au Logis de la Cadène, institution emblématique nichée dans les ruelles médiévales de Saint-Émilion, que le Chef Thibaut Gamba fait rayonner sa vision d’une gastronomie raffinée et audacieuse. À seulement 37 ans, ce jeune Vosgien, au parcours étoilé jalonné par des maisons prestigieuses comme celles de Pierre Gagnaire ou Thomas Keller, a su imposer son style unique: une cuisine végétale et marine, où les produits locaux rencontrent des techniques inspirées du monde entier.

Récemment nommé à la tête des cuisines de ce lieu chargé d’histoire, il perpétue avec brio l’âme du Logis, mêlant respect du terroir et créativité contemporaine. Nous sommes allés à la rencontre de ce chef passionné pour découvrir son univers, ses inspirations et ses ambitions pour cette table étoilée:


"J'ai toujours su ce que je voulais faire. Je n’ai jamais eu à me poser la question..."

Q: Qu’est-ce qui vous a emmené en cuisine, derrière les fourneaux?

"Un milieu familial qui était déjà bien ancré: mes grands-parents étaient restaurateurs. Pas un grand restaurant, mais un routier avec de très bons plats faits maison. C’est là que tout commence, dans une maison bien sourcée, en campagne. Ensuite, j’ai des frères et des cousins qui ont choisi la cuisine avant moi. J’ai grandi dans cet environnement, baigné dedans. Ma maman, aussi, cuisinait énormément et recevait beaucoup. Dès mes huit ou dix ans, je l’aidais tout le temps. Contrairement à mes frères et sœurs, qui ont eu du mal à trouver leur voie, j’ai toujours su ce que je voulais faire. Je n’ai jamais eu à me poser la question."


Q: L’élément déclencheur, c’est donc votre grand-mère, c’est ça?

"Oui, elle cuisinait de gros plats de partage pour des restaurants routiers. Elle faisait des choucroutes, des plats généreux, pour beaucoup de couverts. Toujours avec passion et générosité. Je pense que c’est elle qui nous a transmis cette fibre."


Q: Vous avez aussi grandi dans un environnement agricole?

"Oui, du côté de ma maman, mes grands-parents étaient agriculteurs. Cela se rejoint: la terre, la cuisine, le bien manger. J’ai eu la chance de grandir dans cet environnement. Tout le monde n’a pas cette opportunité, surtout en ville."


Q: La cuisine vous a permis par la suite de beaucoup voyager…Qu'est-ce que vous retenez de ces voyages?"

"J'ai beaucoup voyagé effectivement. Justement, mon frère, mes cousins avaient déjà un parcours international. C'est une des raisons pour lesquelles aussi j'ai fait la cuisine, parce que je savais que je pouvais voyager. Et effectivement, j'ai voyagé un petit peu aux Etats-Unis, en Scandinavie… Ce que je retiens c'est définitivement l'ouverture d'esprit, la mixité de culture, d'opinion, de tout. J'ai vraiment grandi en voyageant.


Q: Une culture culinaire vous a-t-elle particulièrement marqué?

"Pas une en particulier. En fait, ma culture culinaire est un assemblage de petites influences. À New York, par exemple, je travaillais dans une brigade avec 15 ou 20 nationalités différentes: Japonais, Mexicains, Portugais, etc. Chacun apportait quelque chose, que ce soit lors d’une discussion ou en partageant un repas."


Q: Avez-vous une saison préférée pour cuisiner?

"C’est difficile de choisir. J’adore le printemps pour les herbes aromatiques, mais aussi l’hiver pour les agrumes. Chaque saison a ses atouts."


"S'il n'y avait pas eu ce côté multiculturel, je pense pas que je serais venu"

Q: Qu’est-ce qui vous a séduit dans le projet du Logis?
J'ai été attiré par le sud-ouest depuis très longtemps, pour son terroir, la géographie, le climat... Je suis fan. Et puis cette opportunité est venue, avec un groupe comme Angelus, que je connais bien évidemment d'avant, qui représente l'excellence, le bon, le bien-fait, la générosité, c'est des valeurs qu'on retrouve dans ma cuisine (je l’espère). Mais ça n’a pas été évident de prendre une décision de venir dans un village, s'il n'y avait pas eu cette facette internationale de Saint-Emilion, je pense que ça aurait été différent, parce qu'en saison, on peut avoir des restaurants sans table de clients français... S'il n'y avait pas eu ce côté multiculturel international, cette ébullition du tourisme, etc., je pense pas que je serais venu.

Q: Le concept de la ferme 1544 a dû également jouer?

"Travailler avec la ferme est évidemment un gros plus: La ferme, la champignonnière, ça devrait même être un des points prioritaires quand j'énonce les raisons de ma venue, c'est un paradis pour un cuisinier, on peut s’y rendre, sentir les produits, s’inspirer…"


Q: Avez-vous une saison préférée pour cuisiner?

"C’est difficile de choisir. J’adore le printemps pour les herbes aromatiques, mais aussi l’hiver pour les agrumes. Chaque saison a ses atouts."


Q: Votre cuisine est décrite comme végétale et tournée vers le poisson…

"J'ai eu une période scandinave qui m’a beaucoup appris, notamment en Norvège, où j'ai développé une approche différente des produits de la mer. Il y a eu des documentaires pas très positifs sur les fermes de saumon en Norvège, mais en réalité, les Norvégiens sont très respectueux des ressources maritimes. Ma femme est Norvégienne, donc je connais bien leur culture: ils sont rigoureux, que ce soit sur la route ou dans la gestion du poisson. J’ai appris de nouvelles techniques de salaison et de cuisson, car en Norvège, la viande est rare, c’est principalement du poisson.

En arrivant ici, j’ai voulu continuer ce que j'avais commencé en Norvège, surtout avec les ressources exceptionnelles de la région. Pour moi, la Nouvelle-Aquitaine est locale, et je profite des poissons magnifiques à Saint-Jean-de-Luz, Arcachon, et la Cotinière. Je souhaite vraiment faire découvrir de nouvelles saveurs aux clients. Par exemple, si vous mettez un filet de bœuf et un filet de rouget, 80 % des gens choisiront le bœuf. Mon objectif n'est pas de vendre toujours la même chose, mais de faire découvrir des produits différents, d’encourager les gens à manger plus de poisson. Ce n’est pas qu’on leur demande de cuisiner du poisson tous les jours, mais au restaurant, pourquoi ne pas essayer?"


"C'est un véritable dépassement de soi..."

Q: Quelle place ont les vins dans votre cuisine?

"Les produits locaux sont essentiels, ce sont de véritables vecteurs de créativité. On aime se challenger avec des ingrédients de la ville, comme le sarment ou la rafle pour fumer, ou encore le vin pour faire des réductions ou des vinaigres balsamiques. On utilise aussi beaucoup de verjus, l’acidité et l’amertume apportent beaucoup de profondeur dans nos plats. En saison, les grains de raisin trouvent aussi leur place dans nos garnitures, sauces, assaisonnements ou condiments. Les produits locaux occupent une place centrale dans notre cuisine, et bien sûr, on cherche à les marier avec des vins de Bordeaux, mais on reste ouverts à d'autres horizons, sans être extrémistes. C'est vraiment une volonté de notre part de valoriser ces produits."

Q: Quels conseils pourriez-vous donner à un jeune qui voudrait se lancer dans la cuisine?

"Le premier conseil que je lui donnerais, c’est que la passion est essentielle, mais il doit être prêt à affronter des moments très durs, surtout au début. C’est là que la tête joue un rôle crucial. Les débuts sont les plus difficiles, avec l’apprentissage intense, les longues heures et les moments de solitude. Si la passion est là, il faut s'accrocher et ne pas lâcher. C’est un véritable dépassement de soi, un peu comme un sportif qui se donne à fond. Ce n’est pas facile, mais si la passion est présente, elle permet de trouver un équilibre et de surmonter les difficultés. Il faut aussi que ce soit fait avec envie, sinon même avec du dépassement de soi, s'il n'y a pas cette petite étincelle, il le verra rapidement!"


Pour déguster la cuisine du chef Thibaut Gamba:

Rendez-vous au Logis de la Cadène à Saint-Emilion!

https://www.logisdelacadene.fr/fr/




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AdèleAdèle
Responsable éditoriale qui a seulement hâte de l'hiver pour manger des raclettes!